Maintenant que les formes apprises dans l’exercice en ligne selon la méthode (cf. Au-delà de la méthode #19) sont appliquées dans les quatre directions, et selon les attaques de quatre adversaires frappant simultanément à partir d’angles différents, on comprend mieux les raisons de l’exercice en ligne : il ne s’agit jamais dans la méthode de proposer un exercice à caractère martial.

Il faut garder ceci à l’esprit : le champ de bataille n’est pas un pugilat, on ne frappe pas quatre fois de suite le même adversaire, car cela reviendrait à ignorer le danger venant de gauche, de droite et de l’arrière.

La technique idéale (divine disait O Sensei) est telle qu’elle doit toujours vérifier les quatre conditions suivantes :

  1. chaque coup doit être définitif,
  2. chaque coup doit permettre en même temps (c’est à dire par l’action même de frapper) de quitter l’emplacement que l’on occupait l’instant précédent,
  3. chaque coup doit permettre ce déplacement du corps à chaque fois,
  4. ce déplacement du corps est constant, il obéit à une loi mathématique qui le rend toujours analogue à lui-même, quelles que soient les circonstances, cette loi est une homothétie.

La condition n°1 vérifie le concept fondamental des arts martiaux japonais : ichi-go, ichi-è, dont le sens est « une fois seulement ».

La condition n°2 est exprimée sur le plan pratique par le fait qu’il n’existe pas d’esquive en tant que tel en Aikido, et qu’il ne peut pas en exister : parce que l’attaque est en même temps l’esquive. La seule manière d’esquiver est d’entrer en frappant, c’est irimi.

La condition n°3 exprime la régularité du principe d’action, sous l’apparente diversité infinie des formes techniques.

La condition n°4 est la loi de manifestation – en Aikido – du principe unique d’action lui-même (le Un), qui veut que toutes les techniques soient reliées entre elles par une origine commune. La manifestation de cette origine commune c’est, pour la forme technique, le mouvement invariable du corps dans l’espace, en tant qu’il obéit à cette loi.

Philippe Voarino, novembre 2015.