Ce mouvement est bien souvent exécuté au moyen d’une entrée linéaire. Il est dans ce cas encore possible de passer sous le bras d’uke si l’awase (le timing) est respecté, mais le problème apparaît ensuite : uke n’est pas déséquilibré et il lui est très possible de résister à la technique.

Voilà pourquoi, encore et toujours, l’entrée d’Aikido doit être circulaire : le pas tournant de tai no henka (identique pour la même raison à celui d’uchi kaiten nage) est ici ce qui permet de pousser sur le creux du coude d’uke vers le côté de son corps, et c’est cette action qui le déséquilibre et permet de terminer cette forme de sankyo, ou bien de projeter uke directement avec kokyu nage si nécessaire.

Tai no henka est le nom donné au mouvement effectué par le corps quand est mis en action le principe qui unifie deux forces complémentaires du corps humain, définies en Orient par les concepts de yin et yang, et en Aikido par ceux de tenkan et irimi. L’union de ces deux forces – apparemment opposées – dans un équilibre parfait (le pont flottant du Ciel) est la source d’une énergie (ki) considérable, cette énergie ne peut apparaître qu’à la condition que les deux forces complémentaires soient unifiées (ai). Le concept d’Aiki doit donc être compris comme l’énergie qui naît de l’union des contraires-complémentaires.

La voie (do) qui consiste à étudier et mettre en pratique cette union des complémentaires (aiki) est l’Aikido. Il n’y a pas d’Aikido si le mouvement exécuté n’est pas produit par l’union d’irimi et de tenkan. La nature d’irimi et de tenkan est telle en effet que leur union ne peut être réalisée que dans une action spiralée, il n’est pas possible d’unifier irimi et tenkan dans une action linéaire. C’est pourquoi il faut quitter à un moment donné l’action linéaire si l’on veut faire de l’Aikido. Tout ce qui précède ce moment n’est qu’une nécessaire introduction à l’Aikido, c’est le domaine de la méthode.

Philippe Voarino, avril 2018.