Ne pas dépendre des lettres et des mots,
Pointer directement vers l’âme de l’homme. – Sengai

Je crois que l'Aiki est vraiment difficile à expliquer avec des mots, il faut le ressentir pour pouvoir le créer. Il faut utiliser le corps, le système moteur mais surtout pas la partie intellectuelle du cerveau.

Cela explique en partie pourquoi O Sensei a parlé si poétiquement et religieusement de son art, il voulait accéder à la partie non-intellectuelle du cerveau de ses élèves et pour cela il employait des koans.

Un koan est une aporie, une énigme posée par un maître à un disciple, une phrase paradoxale destinée à lui faire percevoir les limites de la logique, à le faire progresser sur la voie de l'éveil en l'obligeant à délaisser le raisonnement et toute considération intellectuelle, pour s’ouvrir à une autre perception de la réalité.

Selon le dictionnaire encyclopédique chinois Cihai de 1936, le koan est un objet de méditation qui serait susceptible de produire le Satori ou de permettre le discernement entre l'éveil et l'égarement.Parce que le Fondateur utilisait ce discours paradoxal, et parce que les jeunes élèves présents n’étaient pas préparés à le recevoir, ils ne comprirent absolument rien aux propos d’O Sensei.

Il est fou le vieux Maître, un peu fou, et on ne comprend même pas ce qu'il veut dire, ni de quoi il parle.

Pierre Warcollier : Aikido, l'esprit de ses techniques et l'expérience spirituelle de Maître Morihei Ueshiba son créateur. – Editeur Guy Tredaniel, page 161.

Pour la pratique, je pense que Aiki signifie avoir le corps entièrement connecté et être capable d'exprimer l’intention à partir du hara. Cela veut dire à la fois ressentir et expérimenter le toucher à travers tout son corps, cela signifie dans un certain sens pouvoir être immobile parce que vous vous déplacez constamment à l'intérieur de votre hara.

Vous devez vivre Aiki dans tout ce que vous faites, ce n'est pas quelque chose que vous pouvez obtenir uniquement sur le tatami. D'autre part, entraînons-nous assidûment, intensément et intelligemment.

a)  Tai no henko (ou henka) est 80% de l'Aiki.

b)  Répétition inlassable de la technique en kotai avec l'esprit totalement investi dans la conduite du geste et de la respiration.

c)  Quand la forme est bonne, répétition du geste avec disparition du kotai, faire une technique souple avec le centre et la respiration ventrale connectée. C’est le travail en awase, la recherche du vide (Mu), l'efficacité réside dans le vide. Mu ne doit donc pas être interprété comme rien.

d)  Applications multiples avec plusieurs partenaires pour bien comprendre les subtilités des déplacements de l'Aiki.

e)  Après avoir ressenti l'Aiki dans votre propre corps, le reproduire sur uke. Je remercie sincèrement Hideo HIROSAWA Sensei pour m'avoir fait ressentir l'Aiki. Considérer l’Aiki comme un sport dont le mérite serait d’évacuer le stress d'une journée de travail est une erreur, car cela va à l'encontre de la recherche du budo. Le budo est la voie du guerrier.

Alain Grason