Avec la modernité, l’Aikido est devenu kawaii (mignon).

Cet "Aikido" ne m’intéresse pas. Je défends d’ailleurs l’idée qu’il n’est pas légitime de lui conserver le nom d’Aikido, car ce n’est pas l’art mis au point, ou plutôt mis au jour, par le Fondateur O Sensei Morihei Ueshiba.

Avant toute chose, l’Aikido est martial. La vidéo ci-dessous en donne un nouvel exemple, qui vient prolonger le dossier précédent : 

On estime au Japon dans la cérémonie du thé que la beauté fondamentale d’une tasse est de remplir sa fonction. Elle peut être plus ou moins belle, certes, mais elle ne peut pas être belle si elle ne remplit pas avant tout sa fonction. Kasama, la ville des potiers japonais, n’est pas loin d’Iwama. Une tasse est faite pour boire le thé, et l’Aikido est conçu pour être martialement efficace. L’Aikido peut être esthétique, mais il ne peut pas être esthétique s’il ne remplit pas sa fonction martiale. C’est le contraire qui est vrai : l’esthétique de l’Aikido est liée à la valeur martiale du mouvement, elle en dépend.

D’autres arts ont évidemment rapport avec l’esthétique : la musique, la danse, la peinture, la littérature… Il n’y a pas dans ces domaines de dimension martiale à proprement parler, mais tous possèdent entre eux et avec l’art martial un point commun : leur esthétique véritable naît des lois d’harmonie qui ont rendu possibles ces arts dans l’univers. Sans respect de ces lois, la musique est une dissonance, la danse une gesticulation, la peinture un barbouillage, la littérature un fatras d’anecdotes. Et l’Aikido sans respect de son essence est de même un simulacre, une pantomime.

"C’est beau, non ?" J’ai vu des juges valider des examens de 4ème dan avec cette formule. La dimension martiale était absente, les techniques étaient suicidaires… c’est beau, non ? Mais qu’est-ce qui est beau, un rond de jambe élégant, un hochement de tête altier, une allure ? De tels critères nous font asseoir à côté du Tao, car la beauté qui est appréciée seulement par la subjectivité d’un individu est une beauté fort relative. Il existe une beauté qui obéit à des lois objectives, c’est celle-là qui doit être recherchée. La tradition de la Grèce antique a gardé la mémoire d’une certaine statue de Zeus qui produisait sur quiconque venait l’admirer le même sentiment exactement. Les Dédale et les Phidias du temps jadis ne créaient rien qui soit personnel, c’est l’univers qui parlait à travers leurs œuvres, parce qu’ils étaient capables de percevoir les lois de cet univers et de les appliquer dans l’art de la sculpture. L’Aikido est l’étude de ces mêmes lois dans le cadre de l’art martial, il n’y a pas d’esthétique véritable sans compréhension et sans respect de ces loi.

On se trompe et on trompe les autres avec l’Aikido mignon.