J’ai écrit sur ce site en 2017 un dossier technique consacré au déplacement de shiho nage ura, qui est intitulé "La preuve par jo dori".

J’essayais d’y montrer que le pas final de shiho nage ura n’est pas enseigné dans l’approche pédagogique de cette technique, et que ceci était un problème quant au danger représenté par une attaque venue des quatre directions. Cette anomalie exige en outre de tori qu’il inverse la rotation de son corps en fin de mouvement, ce qui est parfaitement contre nature, logiquement injustifiable, et qui ouvre la porte aux contre-techniques de shiho nage.

Je renvoie à la lecture de cet article qui permettra de mieux comprendre où je veux en venir aujourd’hui en disant ceci : le déplacement de shiho nage ura et le déplacement de shiho nage omote ne sont pas deux choses différentes.

La seule différence véritable que l’on puisse en effet trouver entre ces deux aspects de la même technique est leur itinéraire : shiho nage omote est une forme uchi (qui passe vers l’intérieur d’uke, devant lui), alors que shiho nage ura est une forme soto (qui passe vers l’extérieur d’uke, derrière lui). Mais dans les deux cas, la rotation du corps de tori autour de son axe est la même, elle est déclenchée vers l’arrière, et elle entraîne obligatoirement deux pas dans chaque forme, pas un de moins.

Il est donc indispensable d’accomplir le deuxième pas de shiho nage ura pour parvenir à délivrer la puissance fournie par la rotation, et pour atteindre du même coup la position de sécurité garantie par le mouvement complet :

La spirale logarithmique dans laquelle est prise le bras d’uke, et qui provoque sa chute, s’enroule vers la terre, chacun est d’accord là-dessus, mais pas "droit devant" : dans la direction au contraire des talons d’uke, dans une dynamique de contraction qui entraîne la nuque de ce dernier au sol par contrainte de ses reins vers l’arrière et vers le bas, le privant de toute possibilité d’échapper par une chute avant.

Ce qu’il faut bien comprendre, c’est que cette direction de la spirale n’est pas un "choix" plus ou moins aléatoire de l’individu, c’est une conséquence de lois physiques mises en branle par la rotation initiale du corps de tori. Le deuxième pas du déplacement de shiho nage est lui-même un élément de cet ensemble dynamique, et ce sont les mêmes raisons mathématiques qui en font la nécessité.

Il n’y a pas en vérité de brise-chute possible sur un shiho nage bien fait, pas plus vers l’arrière que vers l’avant, il n’y a en réalité qu’un écrasement sur lui-même du corps d’uke qui vient percuter le sol avec violence dans la pire des positions. Si le mouvement est exécuté martialement et à pleine puissance, c’est une chute dont on ne se relève pas. Je vois dans ce danger pour l’entraînement la raison qui a poussé à l’origine à ne pas enseigner le deuxième pas de shiho nage ura, par souci de laisser à uke la possibilité d’amortir la technique par une chute avant ou arrière. Mais dans un deuxième temps, parce que ce pas n’a pas été enseigné, sa connaissance a été perdue.

J’ajoute, bien que la technique ne soit pas illustrée ici, que c’est pour la même raison que n’a pas été enseigné le deuxième pas de shiho nage omote. Je consacrerai un dossier technique à expliquer cela en détail.
Pour conclure, shiho nage omote comme shiho nage ura sont aujourd’hui pratiqués en Aikido au moyen d’une rotation qui s’arrête à mi-chemin, et qui ne déplace qu’un pas au lieu des deux pas normalement exigés par le principe irimi-tenkan. Un quart de tour et un pas ont été perdus dans l’exécution de ces deux formes de la technique…